Une nuit de décembre, calme plat. Personne dans les environs et l'épaisse neige recouvrant le sol offrait de magnifiques paysages. Main dans la main, Erwan et moi nous promenions dans les ruelles de Pré-au-Lard, comme tout couple normal. Même si les temps étaient durs, l'avoir à mes côtés me rendaient plus forte, prête à tout affronter. J'affichais toujours un petit sourire niais quand nous nous retrouvions sans vraiment m'en rendre compte. Quelques minutes plus tard, nous étions devant la gare. Face à moi, Erwan me regardait les yeux pétillants, juste avant de m'embrasser tendrement. « Cela fait douze ans maintenant que nous nous connaissons. Douze ans de bonheur, de rires mais aussi de larmes et de disputes. Tu te rappelles ? Nous étions complètement perdus, assis l'un en face de l'autre dans le Poudlard Express à attendre. Douze ans d'amitié, dont les trois dernières officiellement bercées par l'amour. Il est peut-être temps de … » Il s'arrêta quelques secondes pour prendre un petit objet dans sa poche. Son sourire se fit encore plus large, et celui-ci posa une jambe à terre. « Elysia Meryl Weasley, veux-tu devenir ma femme ? » Choc. Je n'en croyais pas mes oreilles. Je l'aurais fait répété si je doutais vraiment de ce que je venais d'entendre. Mais je ne pouvais pas attendre une seconde de plus pour hurler un énorme oui. Et après je ne comptais plus le nombre de fois où je l'avais répété. Ce que je pouvais être niaise. Une hystérique même. Enfin, ce fut mes dernières heures passées en sa présence. La veille, mes parents avaient insisté pour qu'il apparaisse sur notre photo de famille. Ce geste simple prend un tout autre sens aujourd'hui.


Perdue dans mes pensées face à la fenêtre, j'attendais impatiemment que mon fiancé rentre. Le mariage était prévu pour moins de six mois et je passais une bonne partie de mon temps libre à planifier cette journée. Erwan travaillait au Ministère dans le Département de la Justice Magique en tant qu'auror. Il se servait de cette couverture pour protéger le statut de son sang mais également pour soutirer des informations d'une importance primordiale. Ce soir-là, il ne rentra pas à l'heure prévue. Bien. Il devait avoir un léger contre-temps. Cela m'arrivait souvent également. J'entendis des pas s'approcher. Le sol grinçait légèrement en rythme. « Erwan ? » lançai-je en me retournant vivement, le sourire aux lèvres. Non. Ce n'était pas lui. Ma mère était là par contre. « Maman. Tu as besoin d'aide pour le dîner ? » Silence. Ma mère ne me répondit pas. « Bon, on attend Erwan dans ce cas. Je lui ai préparé son …  » Ma mère me coupa dans mon élan. Ses yeux étaient remplis d'une tristesse inhabituelle, comme si quelque chose d'horrible venait de se passer. « Ely, assieds-toi s'il-te-plaît. » Sa voix tremblait, elle n'allait pas bien du tout. Je commençais sérieusement à m'inquiéter. Sans me faire priée plus longtemps, je pris place sur mon lit. « Mais enfin maman, qu'est-ce qu'il se passe ? Tu ne vas pas bien ? » Ma mère approchait doucement pour me rejoindre, ne me quittant pas des yeux. Elle ouvrit la bouche mais aucunes paroles ne sortaient, et ce à maintes reprises. Il lui fallut quelques minutes pour se calmer avant de reprendre ses esprits. « Ma chérie... Erwan ne rentrera pas ce soir. Il ne rentrera plus du tout. » En l'espace de quelques secondes, mon visage se transforma. Mes sourcils se froncèrent et j'avais une énorme boule au ventre. Quelque chose n'allait pas. Je le sentais. Mais je n'arrivais pas à savoir la raison de cette peur. Mes yeux en dirent long sur mes paroles, je n'eus pas le temps de répondre qu'elle reprit directement. « On l'a retrouvé il y a mois d'une heure dans les rues de Londres... Ely, on a vraiment tout fait pour le maintenir en vie, mais aucun sortilège ne marchait. Il était déjà parti. Rien n'était assez puissant. Erwan est mort. Assassiné par le Ministère sûrement. Ils... ils ont du découvrir son identité (...) » Je buvais les paroles de ma mère. Plus elle avançait dans son récit et plus ma boule au ventre s'accentuait. Des larmes commencèrent à ruisseler sur mes joues à ma grande surprise et je fus prise par un vertige. Je portais mes mains à mon visage pour essuyer mes joues toutes mouillées à présent. Mort. Il était mort. Le reste était un assemblage de mots que je n'arrivais pas à comprendre. La seule chose que j'avais intégré était mort, assassiné, ministère. Ces trois petits mots ne cessaient de résonner dans ma tête encore et encore. Je n'entendais plus et ne voyais plus rien. Il ne restait plus moi et ces trois mots. Un vertige plus intense me fut basculer vers l'arrière, ce qui me réveilla. Une horrible douleur me prit. Mon corps entier souffrait. Recroquevillée sur mon lit, les points serrés, je ne cessais de pleurer, encore et encore, en appelant mon fiancé. Ma mère, impuissante, me prit dans ses bras. Dehors, dans le couloir, j'entendais des chuchotements. Tout le monde le savait déjà. Je n'étais plus que la dernière. Lorsque je parvins enfin à ouvrir mes yeux, j'aperçus la robe de mariée reçue la journée même. La robe que je devais porter à notre mariage. Les larmes coulèrent encore plus. « Son plat préféré... Je lui avais préparé son plat préféré, avec mon gâteau au chocolat. Son plat préféré. C'était son plat préféré... » La dernière, je la répétait dans un chuchotement presque imperceptible. Erwan venait de me quitter, et ce pour toujours. Déterminée plus que jamais, je compte faire tout mon possible pour changer cette société avec l'aide de l'Ordre. La machine est en marche.